Jean-Paul stéphan                                                                      22 septembre 2007

Rencontrer sa pratique préférée…

            Dans Sport et Vie N° 104 (septembre – octobre 2007), l'article "Les raisons du plus fort" présente une interview de Julien Absalon dans laquelle le champion expose notamment les raisons qui l'ont amené à choisir le vtt plutôt qu'un autre sport.

À la question de savoir ce qui l'attache au vtt, il répond : "Avant cela, j'ai pratiqué beaucoup d'autres disciplines. J'étais du genre "touche à tout". Je suis passé par le foot, le volley, le basket, la natation et le canoë-kayak. Chaque fois, je me lassais vite. J'ai surtout fait du ski en compétition jusqu'à l'âge de 16 ans et du judo pendant 9 ou 10 ans. Au judo, je n'étais pas mauvais. J'ai été vice-champion de Lorraine! Mais je ne pense pas que j'aurais pu percer véritablement dans ce sport. Puis, à 14 ans, j'ai découvert le VTT avec un voisin. J'ai tout de suite compris que c'était mon truc. Je me débrouillais bien. J'avais les bonnes prédispositions génétiques. Progressivement, j'ai laissé tomber tout le reste".

Tout est dit : pratiquer des sports variés pendant l'enfance pour se forger de solides bases motrices (et, le cas échéant, pouvoir se faire plaisir dans d'autres activités physiques en période de "désaturation cycliste" à l'intersaison), trouver le sport qui nous convient le mieux grâce notamment à ce "tâtonnement actif" d'une activité à l'autre, comprendre que l'on ne peut être performant dans un sport que si, à la fois, il nous plaît et qu'on a les bonnes dispositions génétiques, et arrêter progressivement le reste pour ne pas vivre le passage dans le sport de prédilection comme une rupture qui peut être mal vécue, et pour conserver plus longtemps la motivation pour le sport de prédilection dans la mesure où l'on en est "sevré" de temps à autre par la pratique d'autres activités.

De nombreux parents s'inquiètent de voir leur progéniture pratiquer un sport pendant quelques mois puis se lasser et passer à autre chose. Or ce tâtonnement actif, même s'il est vrai qu'il entraîne des soucis logistiques (changer de club, de matériel, d'horaires de pratique…) est bénéfique à l'enfant qui augmente ainsi ses chances de savoir ce qui lui plaît vraiment et de choisir une activité durable en connaissance de cause. Un peu comme une abeille (tant qu'il en reste…) qui butine sur de nombreuses fleurs finit par reconnaître celles qui fournissent le plus de pollen ou de nectar.

Au contraire, il me semble dommage d'obliger un enfant à pratiquer une activité au moins un an pour l'y inscrire, même si on comprend aisément que c'est plus simple pour tout le monde que l'enfant poursuive l'activité longtemps.

Mais si l'éducateur sportif s'y prend bien, la variété des exercices proposés peut permettre à l'enfant de poursuivre plus longtemps une pratique. Ainsi, l'éducateur vtt qui sait proposer "1000 exercices de vtt cross-country" a plus de chances de conserver les jeunes, même ceux qui ne sont que moyennement motivés par cette pratique. En effet, en procédant ainsi, les jeunes ont l'impression de pratiquer plusieurs activités…Ainsi, samedi dernier, j'ai roulé avec des jeunes mais en même temps on s'est arrêté sur un site de bosses où je leur ai demandé de me proposer d'éventuelles améliorations. On avait apporté des pelles, des pioches, des seaux…trois heures plus tard on y était encore : les jeunes traçaient de nouvelles bosses, des virages relevés, ils les essayaient, les modifiaient…Car en plus de la variété, le sentiment d'être à l'origine de ses actions est un puissant motivateur.

D'ailleurs, dans l'interview de Julien Absalon, on sent bien que personne ne lui a "soufflé" de faire du vtt. Il a choisi lui-même sa pratique préférée. Tant que ce n'est pas néfaste pour eux, laissons les jeunes choisir d'eux-mêmes leurs pratiques. Pour cela il faut parfois oublier un peu ce que l'on aimerait qu'ils fassent. En revanche, on augmente les chances de les amener vers ce que l'on aimerait qu'ils fassent (par exemple développer leur endurance) si l'on sait proposer des exercices variés, ludiques, évolutifs et qui leur donnent l'impression de les avoir décidé eux-mêmes. Subtil n'est-ce pas?