Jean-Paul STEPHAN 12 juin 2009

Fignon – Chambers : deux cultures…

Le vendredi 12 juin 2009, successivement aux journaux de la mi-journée sur France 3 puis France 2, j'apprends que Laurent Fignon souffre d'un cancer des voies digestives (on parle aussi de cancer du pancréas).

Laurent Fignon est un ancien double vainqueur du Tour de France, qui plus est actuel commentateur sur cette même épreuve depuis quelques années. Un ancien champion cycliste atteint d'un cancer…Évidemment, les analyses sur les deux chaînes roulent immanquablement sur le sujet du dopage, d'autant que Laurent Fignon sort justement un livre lequel il avoue s'être dopé (amphétamines, corticoïdes notamment). Il précise aussi que tout le monde faisait comme lui dans des émissions de radio récentes. Donc si on le croit, Bernard Hinault (pour ne citer que lui car il était le principal adversaire de Fignon sur le Tour) était dopé aussi. Cette déduction a son importance au vu du nombre de fois où Bernard Hinault s'est vanté d'avoir gagné ses Tours de France à l'eau claire…

Le dopage de Fignon ne faisait guère de doute avant ses aveux. Il suffisait de voir comment, dans ses commentaires, il éludait cette question à chaque fois qu'elle refaisait surface, c'est-à-dire très fréquemment. La plupart du temps il disait qu'il en avait marre de parler encore et encore de dopage et qu'il préférait qu'on parle de la course. On comprend mieux pourquoi maintenant.

Précision importante : sur France 3 le docteur de Mondenard, éminent spécialiste du dopage s'il en est, explique qu'à l'heure actuelle rien ne permet de dire que le cancer de Fignon soit dû au dopage, et rien ne permet de dire le contraire non plus. En revanche il cite une étude qu'il a lui-même réalisée sur tous les participants du Tour de France depuis 1903 jusqu'à 1998, et où il aboutit à la triste conclusion que ces coureurs souffrent beaucoup plus (5 fois plus si mes souvenirs sont bons) de problèmes cardiovasculaires que le reste de la population européenne, notamment les coureurs des années 1990. Il précise aussi que, contrairement aux idées reçues, le dopage d'hier était tout aussi dangereux que celui d'aujourd'hui (il est vrai que la liste des dégâts des seuls corticoïdes a de quoi faire frémir : perte de densité osseuse, rétention d'eau, augmentation de l'agressivité, fonte musculaire, fragilisation du système immunitaire…).

Bref, Laurent Fignon, comme beaucoup d'autres avant lui, devient plus franc quand les choses se gâtent pour lui, après avoir triché pendant qu'il était "jeune et insouciant" et que ça lui profitait. Et il se dédouane en disant que tout le monde se dopait (je pense que cela fera "plaisir" aux quelques coureurs propres de son époque car je ne doute pas qu'il y en a eu).

Sur France 2, le sujet sur Fignon est complété par un autre sur le sprinter (athlétisme, 100m) Dwain Chambers). On le voit participer à un petit meeting à Montreuil (100m gagné en 10"18 quand même) et le reportage explique que depuis qu'il a été pris pour dopage (testostérone, THG, hormone de croissance…), il est devenu "persona non grata" dans les meetings. On ne l'invite plus. Il cherche donc courageusement à remonter la pente tout seul en expliquant au passage combien ce qu'il a fait avant était mal (un grand classique).